Tigidou_Le_Confiturier

L’histoire d’un sorcier de l’île d’Orléans devenu maître confiturier

 

Il fait chaud en ce matin ensoleillé dans les champs de l’île d’Orléans. 

Un petit garçon tout blond est absorbé par la vue de l’immensité de ce fleuve qui coule jusqu’à l’horizon, entre les montagnes à perte de vue, bordé par les champs agricoles à l’infini. Le fermier Elzéore, cet homme grand et fort qui semble tout droit sorti d’un conte, le rappelle gentiment à l’ordre avec un grand sourire plein de bonté. Il est loin derrière ces camarades, beaucoup plus vieux que lui, dans les rangs de fraise. Il doit remplir ses paniers de bois avant l’heure du midi où il rentrera chez lui avec sa petite bicyclette car les après-midi sont trop chauds pour les enfants dans les champs.

Très jeune déjà, Vincent Paris chérissait un amour particulier pour les fraises de l’île d’Orléans.

Passant ses hivers en Europe durant son enfance, il retrouvait toute la quiétude, la beauté et la pureté de l’île d’Orléans tous les étés. Pour meubler sa solitude, son père lui a même préparé un micro-champ de fraises sur le bord du chemin Royal avec un kiosque pour vendre ses fruits récoltés. Sur un panneau en bois, avec de la peinture trouvée dans le garage, Vincent crée sa première enseigne : Fraise à vendre. L’aventure ne dura que le temps des premières fraises d’été. Mais une fibre entrepreneuriale avait germé chez le jeune apprenti.

C’est dans la métropole de Montréal que Vincent Paris côtoie les grands chefs de la restauration.

À la fois français ou italien, il travaille dans de grands restaurants réputés pendant ses études à la respectable École des Hautes Études Commerciales. Il y apprendra à la fois que la meilleure cuisine se fait avec la fraîcheur et la qualité des ses ingrédients et que le marketing est surtout une affaire d’échantillonnage et de recherche et développement.

Selon Vincent, si la présentation suscite le premier achat, la qualité du produit est, elle, garante d’une entreprise pérenne. Il obtient son premier emploi dans une grande agence de publicité nationale au compte de la plus grande chaîne de restauration rapide au monde.

Par la suite, c’est le phénomène Internet qui le mène à créer l’une des premières agences numériques de la Vieille Capitale où il est revenu s’installer pour y fonder une famille. Les algorithmes ayant eu raison de sa créativité, il apprend durant ce chapitre de conseiller en marketing numérique auprès de grands hôteliers et agences de tourisme que l’agro-tourisme le passionne plus que tout. L’appel de ses champs de fraises, de l’odeur de foin et de fleurs se fait criant.

L’univers lui répond en 2012 alors que presque par hasard, il visite une petite ferme abandonnée à Saint-Jean de l’île d’Orléans.  

Un petit lot de terre tronquée de la ferme de la Fraternité des Chevaliers de Saint-François d’Assise. Une vieille grange encombrée de souvenirs, d’histoires, un lot agricole de mauvaises herbes, de menthe et de chiendent, une maison bi-centenaire croulant sous les projets non finis et les courants d’air. Une occasion pour les fous audacieux ou rêveurs inconscients.  Le projet de la Confiturerie Tigidou y prend vie le 24 juin 2013, dans un premier coin de grange restauré. Le sorcier natif de l’île y concocte des recettes inventées avec les herbes sauvages qui poussent derrière la grange, s’inspirant des méthodes des plus grands maîtres confituriers de France. Une légende est née, celle des meilleures confitures au monde.

Utilisant un sucre naturel biologique de grande qualité, du jus de citron frais et tous les petits fruits qui poussent sur cette île magique, l’apprenti maître confiturier devient Jamtender.

Il explore et perfectionne durant des années de nouvelles méthodes de conservations moins sucrées, des alliages de fruits et d’arômes boréals et d’herbes fraîches, créant une gamme de recettes inédites et savoureuses, à la hauteur de ses nouvelles aspirations; devenir le premier maître confiturier reconnu en Amérique. Et conserver les arômes de l’abondance fruitière orléanaise estivale tout au long de l’année.

Après quelques années, le succès contraint le confiturier et son équipe à chercher un nouvel emplacement pour répondre à la demande. 

Par miracle, l’univers lui répond par le biais d’un conseiller de la municipalité voisine; l’ancien hangar à bateau au cœur du village maritime de Saint-Laurent-de-l’île d’Orléans serait à vendre. C’est alors qu’en pleine pandémie, le grand projet de déménagement de la Confiturerie Tigidou s’enclenche. C’est en automne 2021 que se chauffent les premiers chaudrons dans cet ancien moulin à bois, devenu fabrique de bateau par FX Lachance. L’odeur de confiture commence à se répandre à l’ombre du clocher du village et les confitures Tigidou se retrouvent un peu partout dans les épiceries fines du Québec.

Au printemps 2023, Vincent Paris, devenu artisan maître confiturier, rouvre au public son ancien atelier dans sa grange de Saint-Jean de l’île d’Orléans, devenue la petite ferme Tigidouland, le Jardin Sorcier.  

Tigidouland offre des ateliers d’interprétations et d’identifications des petits fruits de l’île d’Orléans et élabore des potions magiques issues des récoltes du jardin. Mais on raconte que le sorcier confiturier a encore des projets pour conserver les arômes de fraises sauvages et des autres petits fruits de sa ferme. Si le sucre est roi à Saint-Laurent, l’alcool prend racine à Saint-Jean.

La légende du sorcier artisan confiturier de l’Île d’Orléans ne fait que commencer. Et ça sera une histoire tigidou “all the way”.

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